Docteur Bernard GASSER Président Alsace Hémochromatose
Même si nous reconnaissons la complexité et la difficulté de leur métier, nous reprochons parfois à nos médecins de sous-estimer la fréquence de la maladie et de n’évoquer le diagnostic qu‘avec retard devant des signes d’appel semblant rester mal connus (fatigue, douleurs articulaires, teint grisâtre, maladie du foie, diabète, maladie cardiaque). Nous avons tenté d’apporter des données plus précises quant à la réalité et aux circonstances de ces retards par le biais d’une enquête menée auprès des patients homozygotes C282Y.
Nous avons, dans un premier temps, fait parvenir aux malades alsaciens un questionnaire axé sur les circonstances de découverte, sur le ou les signes ayant conduit à la consultation initiale et l’intervalle entre cette consultation et le diagnostic. Dans un second temps, cette enquête a été élargie, sous l’égide de la FFAMH, à l’ensemble du territoire. La diffusion nationale de ce questionnaire a été assurée par les associations HAq, HPC, AHO, AHP ainsi que par les services de prélèvements de l’Etablissement Français du Sang pratiquant des saignées thérapeutiques.
374 patients ont répondu (149 femmes / 225 hommes). L’âge moyen au moment du diagnostic est de 47 ans chez l’homme, de 50 ans chez la femme.
Un peu moins d’une fois sur trois, le diagnostic fait suite à l’enquête génétique pratiquée dans la famille d’un hémochromatosique connu.
Une fois sur quatre, la surcharge en fer est découverte par « hasard » lors d’un bilan pratiqué pour une toute autre raison (bilan de routine ou pré-opératoire par exemple).
Un peu moins d’un malade sur deux est diagnostiqué au décours d’une consultation pour fatigue, douleurs articulaires ou atteinte hépatique. Une maladie cardiaque, un diabète ou un teint de peau devenant grisâtre sont beaucoup plus rarement à l’origine du diagnostic. En cas de fatigue, le délai diagnostique est le plus souvent court car les médecins, en cherchant une possible anémie, pratiquent un bilan du fer. En cas de douleurs articulaires ou d’atteinte hépatique, le diagnostic est évoqué, une fois sur quatre, après une, voire plusieurs années.
Cette enquête fait ressortir deux points essentiels :
En premier lieu, il apparaît que plus d’un malade sur deux est diagnostiqué au décours de l’enquête familiale ou d’une surcharge en fer découverte par hasard. Ces malades ne présentent pas de symptômes ou présentent des signes qu’ils négligent. L’extrême fréquence de cette situation rend essentielles les actions de sensibilisation de la population générale. Cette donnée représente également un argument fort en faveur du dépistage systématique de la maladie, ce d’autant que nombre de malades asymptomatiques présentent un taux très élevé de ferritine (supérieur à 1000 µg/l près d’une fois sur deux).
En deuxième lieu, pour les patients qui consultent pour tel ou tel symptôme en rapport avec la maladie, il apparaît que les douleurs articulaires et les atteintes du foie représentent les signes qui conduisent aux retards diagnostiques les plus importants. Ces données seront publiées dans une revue plus particulièrement dédiée aux médecins généralistes et serviront de base à l’élaboration d’une plaquette destinée à sensibiliser l’ensemble de la population médicale aux signes d’appel de la maladie. La précocité du traitement par saignées est en effet primordiale pour éviter l’apparition de complications gravissimes en particulier hépatiques
Article paru dans le bulletin de la FFAMH N°4 « Savoir Fer » mai 2012
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